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Paru dans MBR Info, une étude portant sur un biomarqueur de la qualité ovocytaire, par le Dr Nathalie Lédée.
Impact de la quantification du G-CSF folliculaire sur les décisions de transfert embryonnaire
Enfin un biomarqueur de la qualité ovocytaire !
Titre de l'article initial: Impact of follicular G-CSF quantification on subsequent embryo transfer decisions: a proof of concept study
Auteur de l'article initial: N. Lédée
Référence de l'article initial: Hum. Reprod. (2013) 28 (2): 406-413.
Rédacteur MBR Info: N. Lédée
INTRODUCTION.
La qualité ovocytaire reste un facteur majeur limitant le succès des traitements de procréation médicalement assistée (PMA). Seuls 5% des ovocytes collectés en PMA et 20 à 25% des embryons transférés conduiront à une naissance. L’analyse de la morphologie ovocytaire est faiblement discriminante et permet principalement une sélection négative. L’observation morphologique séquentielle des embryons, bien qu’efficace, reste peu discriminative du potentiel d’implantation. Parvenir à documenter la qualité et la compétence des ovocytes dont ils sont issus est donc requise pour améliorer le choix des embryons à transférer et représente donc un enjeu majeur.
Dans le cadre de recherche sur les mécanismes de l’implantation embryonnaire, nous avons découvert que la mesure du Granulocyte- Colony Stimulating Factor dans des fluides folliculaires individualisés (FF G-CSF) permettait de documenter la compétence ovocytaire aussi bien en cycles naturels et stimulés. Les concentrations du FF G-CSF évalué en microbilles (Luminex Map Technology, Bio-Rad) prédisaient significativement le potentiel d’implantation de l’embryon correspondant et ceci indépendamment de la morphologie embryonnaire. L’objectif de cette nouvelle étude est d’évaluer l’impact potentiel du dosage individuel du G-CSF sur la politique de transfert d’embryons- à savoir si cette information modifierait le choix de l’embryologiste de transférer en frais, congeler ou détruire les embryons correspondants.
RÉSULTATS:
Au CPMA de l’Université de Liège, entre mai 2008 et mai 2010, les traitements réalisés pour ICSI chez 78 patientes ont permis d’analyser 523 FF individuels d’ovocytes ayant donné 116 embryons transférés frais, 275 embryons congelés dont 79 seront secondairement transférés, et 131 embryons détruits et donc non transférés. Nous confirmons que le FF G-CSF est prédictif de la survenue d’une implantation: l’aire sous la courbe ROC évaluant le pouvoir discriminant du FF G-CSF à prédire une grossesse évolutive, après analyse multivariée atteint 0.77 ([0.69-0.83]-p<0.001) alors qu’elle atteint seulement 0.66 ([0.58-0.73] p=0.01) pour l’observation morphologique des embryons. Afin d’évaluer l’impact combiné du FF G-CSF et du score morphologique de l’embryon, nous avons catégorisé le FF G-CSF en 3 classes : Classe I si >30pg/ml (la plus haute valeur prédictive positive pour l’implantation), classe II si <30pg/ml et > 18,4 pg/ml, et Classe III si <18,4 pg/ml (la plus grande valeur prédictive négative pour l’implantation) et ABC pour la morphologie.
Les embryons issus d’ovocytes de classe 1 pour le FF G-CSF ont un taux d’implantation de 36% alors qu’il décroît a 16% pour les classes II et 6% pour les classes III. Les embryons de classe I pour le G-CSF et de qualité morphologique optimale atteignent des taux d’implantation de 54% (p< 0.001) alors qu’un embryon de même morphologie mais Classe III pour le G-CSF restera à 6% de taux d’implantation. Apres décongélation, les embryons dérivés de follicules classe I avait un taux d’implantation de 37%, significativement plus élevé que ceux issus de follicules classe II ou III (8 et 5% respectivement, p<0.001. La moitié des grossesses gémellaires sont survenue grâce au transfert de 2 embryons A- pour la morphologie- Classe I pour le G-CSF. Un choix non optimal a été réalisé chez 28% (22/78) des patientes aboutissant à une diminution des taux de grossesses de 36% à 18% (p=0.04) entre les patientes avec choix optimal versus non optimal si l’on tient compte du FF G-CSF. L’hypothèse est que l’on observerait une augmentation relative de 35% de taux de grossesse par un choix éclairé par la connaissance du FF G-CSF en ce qui concerne l’embryon à transférer. En ce qui concerne les embryons détruits, 10% d’entre eux étaient de Classe I pour le G-CSF malgré une morphologie mauvaise. Pour 5 patientes (6%), l’embryon au plus haut potentiel de la cohorte disponible à J3 a été détruit.
CONCLUSIONS
La mesure du FF G-CSF pourrait, en améliorant la connaissance de la potentialité des embryons générés
(1) augmenter de 35% les taux d’implantation au premier transfert d’embryon frais en PMA,
(2) permettre un meilleur contrôle des grossesses multiples dont les impacts sur la morbidité maternelle et fœtale sont démontrés
(3) réduire le nombre d’embryons cryopréservés à ceux conservant une potentialité tout en sauvegardant certains embryons destinés à la destruction selon leur simple morphologie.
L’utilisation clinique d’un tel biomarqueur pourrait réduire le temps nécessaire à l’obtention d’une grossesse, et permettre dès lors l’économie à la fois d’énergie, et de coûts, engendrés par des cycles inutiles.
POINTS FORTS
Premier biomarqueur de la qualité ovocytaire
Confirme l’impact du dosage individuel du G-CSF sur la politique de transfert d’embryons-
POINTS FAIBLES
alourdit l’étape de la ponction ovocytaire (nécessité d’un prélèvement individuel de chaque follicule)
Evaluation du cout-bénéfice non encore réalisée