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Un blog de FIV, entre difficultés, doutes et espoirs. Et avec des infos scientifiques sur l'AMP

PMA, GPA, la suite des (faux) débats (2)

On lit des choses tristement ahurissantes dans la presse: "la PMA fait des victimes au PS". Et bien je crois qu'ici, et ce indépendamment des opinions et encartages politiques des unes et des autres, on s'en fout des victimes au PS !

Est-il utile de rappeler qu'elle en fait surtout médicalement parmi les couples infertiles qui ne réussissent jamais ? Je crains que les chiffres, à la louche, ne lorgnent vers le 50% des couples qui repartent les bras vides au bout de plusieurs années de tentatives...

 

J'en profite pour mettre en ligne un article paru dans le Monde et envoyé par Bounty Caramel (merci !!!) qui parle de la position du Comité National d'Ethique et de sa volonté de se saisir de cette question de la PMA pour tous (enfin pas pour les homos hommes, désolée les garçons, la GPA risque de ne pas passer pour vous non plus !).

D'ailleurs, une pensée à l'instant: la GPA serait autorisée demain "grâce" aux homos alors que des couples hétéro qui ont des pb d'infertilité utérine depuis des années n'y arrivent pas, cela serait un peu hallucinant... Certes qu'importe les moyens, pourvu qu'on y arrive mais cela remet bien à sa place l'importance qu'on accorde à l'infertilité et aux gens qui sont concernés dans notre société...

 

 

"La question de la PMA justifie des états généraux"

LE MONDE | 01.02.2013 à 11h49 • Mis à jour le 04.02.2013 à 11h17 Propos recueillis par Gaëlle Dupont

 

L'immunologiste Jean Claude Ameisen, nouveau président du Comité consultatif national d'éthique.

 

Jean-Claude Ameisen, professeur d'immunologie à l'université Paris-Diderot, est président du Comité consultatif national d'éthique depuis novembre 2012. Le CCNE, créé en 1983, compte 40 membres, dont des médecins, biologistes, juristes, philosophes, sociologues, anthropologues, représentants des religions. Il a pour mission de donner des avis sur les problèmes éthiques en biologie, médecine et santé. François Hollande aurait l'intention d'y faire appel pour l'aide médicale à la procréation, mais le comité n'a pas été saisi officiellement.

 

Le Comité consultatif national d'éthique a décidé de se saisir de la question de la procréation médicalement assistée (PMA), pourquoi ?

La loi encadre actuellement l'AMP [autre appellation de la PMA] de manière précise. Seuls les couples constitués d'un homme et d'une femme, que des raisons médicales empêchent de concevoir un enfant, peuvent y avoir accès. Mais d'autres demandes se font jour, notamment l'accès des couples de femmes à l'AMP. Une autre, liée aux avancées des techniques de congélation des ovocytes, concerne la possibilité pour les femmes de faire prélever et conserver leurs ovocytes afin de pouvoir envisager de recourir à l'AMP à un âge où leur fertilité sera compromise.

 

Plutôt que de traiter ces questions au cas par cas, nous avons décidé de nous saisir de la question globale de l'AMP. Nous pensons que cette question justifie une réflexion de fond de la société, qui pourrait prendre la forme d'états généraux.

 

Quelles sont les questions soulevées ?

 

La principale dépasse le cadre de l'AMP et concerne le rôle général de la médecine. La médecine doit-elle se limiter à prévenir et traiter des maladies, ou devrait-elle aussi répondre à des demandes sociétales ? L'Organisation mondiale de la santé définit la santé comme un état de bien-être physique, psychique et social. La santé c'est donc plus que l'absence de maladie : c'est du bien-être.

La médecine peut bien sûr y contribuer, mais elle ne peut, à elle seule, permettre de l'atteindre. L'âge de plus en plus tardif de la maternité, qui suscite la demande de prélèvement et d'autoconservation des ovocytes, a pour raison principale les contraintes sociétales imposées aux femmes : problèmes de garde d'enfant, difficulté de poursuivre une carrière en cas de maternité, etc.

 

Est-il souhaitable de tout demander à la médecine, plutôt que de faire en sorte que la société respecte les droits des femmes, dont celui de choisir le moment de leur maternité ?

 

La médecine permet depuis trente ans aux couples hétérosexuels stériles d'engendrer, ne leur a-t-on pas donné dès cette époque un droit à l'enfant ?

La médecine n'intervient pas en raison d'un droit à l'enfant, mais en réponse à un désir d'enfant qu'une stérilité ou une infertilité pathologique empêche de réaliser.

 

Quels sujets devraient être abordés par les états généraux ?

 

Il y a la demande d'AMP par des couples de femmes, par des femmes célibataires, par des couples d'hommes (avec demande d'accès à la gestation pour autrui), il y a la demande d'autoconservation des ovocytes... il y a aussi la demande de la levée de l'anonymat des donneurs de gamètes, qui resurgit régulièrement, et qui, dans le cas des couples de femmes, pourrait répondre au souci que l'enfant puisse avoir une référence à son père biologique.

Une autre question est celle du remboursement par l'assurance-maladie. Est-ce que des demandes sociétales autour de l'AMP devraient être prises en charge par la collectivité, ou devrait-on considérer, comme en Grande-Bretagne, qu'il ne s'agit pas d'un problème majeur de santé publique, en particulier en cette période de contrainte économique ? Et si tel était le cas, on créerait alors une discrimination par l'argent.

 

Pouvons-nous nous prononcer en ignorant le "tourisme procréatif" ?

 

L'Europe s'est construite sur des principes communs de respect de la personne, mais dans certains domaines concernant l'éthique biomédicale, les législations peuvent être très différentes, voire contradictoires. En même temps, il y a un droit de libre circulation des citoyens à travers l'Europe. Il faut donc réfléchir au fait qu'il est possible de traverser la frontière pour avoir accès à des pratiques interdites dans notre pays. 

L'important est de ne pas pénaliser les enfants : ce serait leur faire porter la responsabilité du comportement de leurs parents, comme cela a longtemps été le cas pour les enfants "illégitimes". Mais reconnaître leurs droits aux enfants nés à l'étranger par gestation pour autrui ne signifie en rien que l'on autorise en France la pratique qui leur a permis de naître.

 

La gestation pour autrui fera-t-elle partie de votre réflexion ?

 

Oui, en sachant que le CCNE a déjà émis en 2010 un avis négatif sur ce sujet, en raison du risque majeur d'instrumentalisation des femmes. Dans les pays où la gestation pour autrui est autorisée, les "mères porteuses" sont en général d'un niveau socioéconomique moins favorisé que les couples demandeurs. En dehors d'exceptions, auxquelles on pourrait réfléchir, les femmes les plus susceptibles de contribuer sont les plus pauvres et les plus vulnérables.

 

L'avis du CCNE est-il indispensable pour légiférer ?

 

Non. Mais la loi sur la bioéthique de 2011 prévoit que le CCNE demande d'initier des états généraux si une modification de cette loi est envisagée. L'ouverture de l'AMP à des indications sociétales nécessiterait une modification de la loi. Nous avons donc décidé, comme le veut la procédure, de consulter l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques et les commissions sociales de l'Assemblée nationale et du Sénat. Si des états généraux avaient lieu, ils rendraient probablement leurs conclusions à l'automne 2013.

 

Que pensez-vous du débat sur le mariage homosexuel ?

 

Je trouve qu'il ne laisse pas de place à la réflexion. Une des raisons de son caractère véhément est peut-être en partie liée au fait qu'il mêle la question de l'AMP à celle de la loi sur le mariage pour tous, favorisant ainsi une confusion entre deux domaines qui ne sont pas du tout du même ordre.

 Mais l'essentiel est ailleurs : nous avons une culture du débat qui se limite trop souvent à confronter, parfois violemment, des points de vue déjà établis. Dans d'autres pays, comme les pays d'Europe du Nord, la Grande-Bretagne, le Canada, le débat consiste au contraire en une écoute de l'autre et un dialogue, pour favoriser une réflexion collective originale qui dépasse le point de vue initial de chacun. C'est cette approche que nous menons depuis trente ans au CCNE, et qui a été conduite par les états généraux de la bioéthique durant l'été 2009. Cela demande de l'humilité, du respect, et du temps.

 

 
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K
Merci pour ce texte très intéressant. J'ai hâte que ces débats aient réellement lieu, et en même temps ça me fait un peu peur.<br /> J'aime beaucoup sa conclusion sur la manière dont les débats se font généralement en France, par rapport aux autres pays - c'est tellement vrai.<br /> Bises
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